Lorsque l’on m’interroge sur les meilleurs concerts auxquels j’ai assisté au cours de ma vie (ce qui a dû arriver deux fois en 15 ans), je commence généralement par mentionner le passage de Jimmy Page et Robert Plant à la Patinoire de Bordeaux en 1999 pour la promotion de Walking into Clarksdale.  Hier soir, il ne m’aura pas fallu deux minutes avant de me rappeler pourquoi.

Récit d’un moment mémorable. 

Robert Plant fait son entrée sur la scène du Bataclan, accompagné de ses « Sensationnal Space Shifters » avec Babe I’m gonna leave you. La voix est là, pleine, assurée, puissante, troublante. La gestuelle est intacte – personne n’agrippe un pied de micro comme lui. Dans la salle, le public est aux anges. Sur scène, le chanteur et les musiciens semblent prendre leur pied. Cela change de tous ces groupes blasés, qui donnent l’impression de venir à l’usine… Le guitariste Justin Adams, en particulier, est totalement déchaîné. Le musicien africain dont le nom et le pays d’origine m’échappent s’intègre parfaitement dans ce dispositif plutôt rock.

BABE I’M GONNA LEAVE YOU

Tout ce beau monde enchaîne compos passées de Plant (comme Tin Pan Valley, excellente), compos à venir, comme Rainbow, (l’album doit sortir en septembre) et toutes les deux ou trois chansons un titre de Led Zep, histoire que personne ne décroche. Après Babe I’m gonna leave you, on a droit à Going to California (le passage aigu chanté un octave en dessous, quand même), un Black Dog sans le riff de Page (un peu étrange, donc), What is and what should never beWhole Lotta Love...

Pendant ou entre les chansons, Plant s’exprime avec quelques restes de français, souvent avec humour. Il lance à plusieurs reprises « écoute, Pascal(e)! » (as-tu bien écouté, Pascal(e)?). Très au fait de l’actualité française, d’ailleurs: « Il s’est passé un truc fou chez vous hier soir… De la musique de merde a été jouée partout dans le pays! » Il a également évoqué les One Direction (en espérant ironiquement que sa tournée aurait autant de succès je crois) et lorsque les gens ont sifflé, a répondu, grand prince, « Ne faisons pas de l’âgisme, le monde continue à tourner, avec de nouvelles générations, qui font des choses différentes… ». Plus tard, lorsqu’une jeune femme lui crie « I love you », il ne peut réprimer un sourire, puis regardant en direction de celle qui l’a interpellé, avec un sourire aussi amusé que mutin, il lance « Sacrebleu! » Des groupies ont sans doute défailli pour moins que ça… Par contre, le mec dans le public qui a lancé un « po-po-po-po-po-po-po » façon Seven Nation Army, tu t’es trompé de crèmerie…

ROCK’N’ROLL

Au final et alors que Robert Plant vient d’achever le concert avec le très attendu Rock’n’Roll, cette réflexion: peu importe que Led Zeppelin se « reforme » ou qu’il joue à nouveau avec Page ou John Paul Jones. Tant qu’il garde ce plaisir de jouer et qu’il le partage ainsi, Plant a bien gagné le droit de faire ce qu’il veut. Et au fait, pourquoi assiste-t-on à des concerts dans des salles plus grandes, déjà?