Broadway_the_golden_ageVoilà un documentaire intéressant. Un homme, le réalisateur Rick McKay, se penche sur l’un des aspects les plus fascinants de la culture américaine, la comédie musicale : Broadway. En se faisant sa propre culture sur le sujet, lorsqu’il était jeune, Rick McKay, s’est vite rendu comte que tout le monde répétait ce qui semblait être une évidence : Broadway a connu un âge d’or, avec des actrices comme Ethel Merman, Angela Lansbury, Kim Stanley, des acteurs comme Marlon Brando, Ben Gazzara, Jerry Orbach ou des danseurs comme Bob Fosse, Gwen Verdon, les Nicholas Brothers, etc. Cet âge d’or s’est soi-disant achevé avec l’avènement de musicals plus "rock" comme Hair et surtout avec une nouvelle invasion britannique, par le biais de Lloyd Weber et Tim Rice, de leurs Jesus Christ Superstar ou Cats, de producteurs comme Cameron McIntosh. Rick McKay a fini par se poser une question : cet âge d’or a-t-il vraiment existé ? Chaque époque n’est-elle pas destinée à devenir un âge d’or à la génération suivante ? Armé d’une simple DV, il est allé interviewé ni plus ni moins que les plus grandes stars (encore vivantes) de ce supposé "golden age". C’est le plus impressionnant dans ce documentaire : elles sont toutes là, à l’exception notable de Julie Andrews, mais qui a l’excuse d’avoir eu des ennuis de santé à l’époque. Pas toujours en bon état, rarement à leur avantage (éclairage sommaire, image très brute), mais à peu près tout ce que Broadway a compté de grande star des années 40, 50 et début 60 qui tient encore assis devant une caméra (les interviews ont eu lieu à la fin des années 90) est là. Tous et toutes décrivent une vie à peu près similaire (où est-ce la magie du montage ??) : précarité, vie pratiquement communautaire (ils citent tous le même bar et le même restaurant), coût très peu élevé des spectacles. Lorsqu’il s’agit de citer leur plus grand influence théâtrale, ils et elles sont unanimes : c’est Laurette Taylor, dont l’auteur, il le reconnaît lui-même, n’avait jamais entendu parler avant de faire son film. Laurette Taylor est une actrice de la première moitié du XXè siècle, morte à la fin des années 40, réputée pour son alcoolisme et son jeu extraordinaire. LE rôle qui a marqué les témoins du film est celui qu’elle tenait dans The glass menagerie, de Tennesse Williams. Il n’existe que très peu de documents filmés d’elle, à part quelques muets, il n’y a que des essais pour Hollywood qui n’ont mené à rien. Ces essais, assez impressionnants, sont dans le film. Toutes et tous se rappellent aussi avec émotion les débuts fulgurants et la beauté sauvage de Marlon Brandon (qui n’est pas interviewé, en revanche, alors qu’il était toujours vivant lors du tournage, mais qui est remercié dans les crédits). La question centrale du film : "était-ce un âge d’or ?" est bien évidemment largement explorée. Pour beaucoup la réponse est positive. Pour certaines comme Angela Lansbury, il est définitivement révolu. D’autres se souviennent qu’à leurs débuts dans les années 50, on disait déjà que Broadway est fini. Tous soulignent en tout cas le prix exhorbitant des productions d’aujourd’hui, avec comme exemple le plus extravagant la fameuse place à 480 dollars pour The Producers, de Mel Brooks, avec Nathan Lane et Matthew Broderick à la fin des années 90. Cette surenchère dans les budgets serait en grande partie responsable selon eux de l’évolution des musicals. Certains s’en prennent au micros, qui tuent l’esprit de la comédie musicale.  D’autres aux moyens gigantesques, comme cet hélicoptère qui se pose sur la scène dans Miss Saigon, qui ne laissent plus aucun espace aux acteurs. Le documentaire ne présente malheureusement que des bribes de performances, souvent parce que ces performances n’ont pas été enregistrées.
D’habitude, je ne m’intéresse guère aux bonus DVD, mais dans ce cas précis, ils valent très largement le détour. Une fin alternative est proposée, avec des acteurs de la génération suivante qui évoquent ce qu’est devenu Broadway. Cette fin a été abandonnée car le réalisateur travaille actuellement à un autre film, justement intitulé Broadway : The next generation, dont le DVD nous offre un petit aperçu (de 35 minutes quand même), avec Patti LuPone, Betty Buckley et bien d’autres. Autre trésor, cette leçon de danse par Bob Fosse et Gwen Verdon, sur le titre Whatever Lola Wants, tiré de Damn Yankees. Plus anecdotique, une vingtaine de minutes de reportage sur les premières du film (qui a ensuite été largement récompensé) à Broadway et Hollywood (Fay Wray, la première victime de King Kong, en chaise roulante, est même de la partie), avec tout le cast, venu récolter les dernières bribes d’une gloire bientôt passée.
Le film, au vu des commentaires que j’ai lu ou entendu, me semble un poil surestimé. Mais il réssucite pendant quelques dizaines de minutes des performers d’une qualité exceptionnelle qui risquent de tomber dans l’oubli et en cela, il est essentiel.