J’ai assisté hier après-midi à la projection de Kiki, le film de Sara Jordenö et Twiggy Pucci Garçon, dans le cadre du Festival Chéries-Chéris, en partenariat avec la Paris Black Pride. Dommage que la réalisatrice ou les protagonistes du documentaire n’aient pas été présents, je leur aurais bien demandé pourquoi il avait été choisi de séparer un peu artificiellement la scène kiki et la ballroom scene, qui, vu d’ici, semblent être les deux faces d’une même pièce. Mais c’est vraiment un détail.

Kiki présente de nombreuses similitudes avec Paris is burning, le docu mythique de Jennie Livingston. Et pour cause… les deux dépeignent la vie de plusieurs vogueuses et vogues new yorkais, avec juste 25 ans d’intervalle. On suit Gia (photo), Chi Chi ou Twiggy pendant plusieurs années (de 2011 à 2015 environ, si j’ai bien suivi). Des témoignages durs, poignants mais aussi pleins d’espoir. Gia (photo), notamment, crève l’écran. Elle évoque sa transition, débutée un peu après le début du tournage de Kiki, la vie dans son quartier, sa famille et surtout, elle explique combien elle a dû se blinder pour pouvoir garder la tête haute et résister. On la voit d’ailleurs se faire insulter dans la rue par une bande de gamins et répliquer avec force. Pour Gia et les autres, le voguing est plus qu’un moyen d’expression, c’est un moyen de survie. Ou c’est peut-être un moyen de survie parce que c’est un moyen d’expression. Et davantage qu’une équipe, les Houses deviennent alors de véritables familles.

Un autre moment fort: Gia, encore elle, explique que si le mariage a été autorisé dans tous les Etats par la Cour Suprême, c’est parce que beaucoup de couples gays blancs l’ont voulu. Pour elle et beaucoup de ses amis, le mariage est une préoccupation lointaine. Ils et elles cherchent déjà à se loger et à être traité.e.s correctement par la société. Ils et elles sont loin du compte. Alors le mariage…

En France la scène s’est implantée dans les années 2010. Si elle fonctionne de la même manière que la scène américaine, les enjeux ne semblent pas tout à fait les mêmes. C’est ce qu’ont avancé plusieurs membres de la House of Ladurée, première House de voguing exclusivement française, venus commenter le film après la projection du film. Pour Mother Rheeda, il y a ainsi une différence importante entre les scènes new yorkaise et parisienne. « Dans le documentaire on voit que dans la scène new yorkaise, la question du social passe avant l’aspect artistique. A Paris, l’artistique vient avant le côté social », a-t-il affirmé.

Kiki a gagné le Teddy Award du meilleur documentaire en 2016