Inauguré à l’été 2015, le Mémorial ACTe de Pointe à Pitre en Guadeloupe « a pour ambition originelle de créer un lieu dédié à la mémoire collective de l’esclavage et de la traite, ouvert sur le monde contemporain ». On peut notamment y visiter une exposition permanente, qui retrace l’histoire de l’esclavage, en s’appuyant sur des textes, des supports vidéo,  des œuvres d’artistes contemporains, peintres ou plasticiens. Le parcours dure 1h30-2h nous prévient-on à l’entrée. Après coup, cela semble une estimation basse et suppose que l’on passe un peu rapidement sur certains aspects. Ce qui n’est pas si grave au fond, tant l’image d’ensemble suffit à laisser une trace indélébile aux visiteurs.

Outre l’aspect historique de la traite négrière, qui est bien sûr traité en détails, ce qui frappe le plus dans cette exposition permanente, c’est la volonté de rappeler que contrairement à ce que stipulait l’horrible Code Noir de Louis XIV, les esclaves étaient des hommes, des femmes, des enfants et non des « meubles ». Dans une salle, ou plutôt un couloir, vous vous retrouvez dans la cale d’un bateau qui transportait les esclaves vers leur servitude. Si les projections de corps recroquevillés sur le sol et l’ambiance sonore faite de craquement de bois et de cris ne vous glacent pas le sang, je ne sais pas ce qui le pourra. Dans la salle du Code Noir justement, on peut tourner les pages du l’un livre numérique géant soi-même et découvrir article après article la volonté de déshumanisation des hommes et des femmes noir.e.s. En tournant la tête vous verrez accrochés au mur les instruments de l’oppression, entraves, fouets, piques… Presque insoutenable.

La dernière partie de l’exposition revient sur le long chemin de l’émancipation et de l’affranchissement: retour en Afrique pour créer le Sierra Leone ou le Liberia, conférence de Paris avec Césaire et Senghor en figures de proue où le panafricanisme prend forme, mais aussi les luttes contre la colonisation et la ségrégation à travers l’art, la politique ou l’engagement intellectuel. François Fillon serait d’ailleurs bien inspiré de venir faire un tour à Pointe à Pitre, lui qui prétend que la colonisation n’avait pour objet que le « partage de culture ».

Le site de 7000 mètres carrés présente aussi des expositions temporaires ou divers événements. Il se trouve à quelques minutes de voiture de l’Université Antilles Guyane. A ne pas rater si vous vivez ou si vous venez faire un tour en Guadeloupe.