Stephen Sondheim se verra remettre un Tony Award spécial pour l'ensemble de son œuvre le 15 juin prochain à New York. Bien que l'intégralité de ce blog puisse être considérée comme une déclaration d'amour sans cesse renouvelée à un auteur/compositeur d'exception et au genre qu'il a contribué à faire briller, j'ai voulu lui rendre un hommage particulier en donnant la parole chaque jour cette semaine à ceux qui l'aiment : blogueurs, journalistes, ou simples admirateurs. 

C'est Laurent, du blog Paris-Broadway, qui ouvre le bal.

Ta première rencontre avec l'œuvre de Sondheim ?
Sur scène ? A Little Night Music,la production du National Theatre de Londres, mise en scène par Jeremy Sams, en octobre 1995. La magnifique Judi Dench dans le rôle de Désirée et Patricia Hodge en Charlotte. Quinze musiciens qui faisaient littéralement l'amour aux sublimes orchestrations de Jonathan Tunick. J'ai mis beaucoup de temps à redescendre sur terre après.

Pourquoi aimes-tu ses musicals ?

Parce que Sondheim n'insulte jamais son public en "se mettant à son niveau". Au contraire, il le tire vers le haut, le force à se dépasser, en refusant la facilité qui caractérise tellement d'œuvres récentes. Ce qu'il écrit rend heureux ou remue les tripes, sans qu'on comprenne tout de suite complètement pourquoi. Il est l'un des rares auteurs à savoir jouer aussi subtilement de l'alliance de la musique et des lyrics. On peut relire ses lyrics dix fois et y trouver chaque fois une nouvelle profondeur. Et quel compositeur ! Sa musique est tellement ancrée dans la tradition de Broadway et à la fois tellement nouvelle. Sondheim est pour moi l'illustration parfaite d'une maxime trop souvent oubliée de nos jours : on ne fait progresser ou on ne renouvelle un genre qu'à la condition d'en avoir une connaissance intime.

Si tu ne devais garder qu'une scène… 
C'est difficile de choisir. Je suis toujours bouleversé par "Being Alive" à la fin de Company. J'ai vu Company pour la première fois alors que j'approchais de l'âge de Bobby, qui fête ses 30 ans dans la pièce. C'était Adrian Lester qui jouait le rôle. Il chantait "Being Alive" avec une intensité que je n'ai jamais retrouvée depuis. Lorsqu'il arrivait à "But alone is alone, not alive", il n'y avait plus beaucoup d'yeux secs dans le public !

Ton lyric préféré ?
"The choice may have been mistaken
The choosing was not.
You have to move on."
("Move On", Sunday in the Park With George)

C'est ma philosophie de la vie, en trois lignes. Je suis profondément ému chaque fois que je l'entends.