Pardon, mais c’est trop bon
Une guitare, Bernadette Peters, une chanson extraite de Carousel : une certaine idée du bonheur. Tirée de l’album I’ll be your baby tonight, voici What’s the use of wond’rin’. Merci à Stéphane pour le tuyau.
Une guitare, Bernadette Peters, une chanson extraite de Carousel : une certaine idée du bonheur. Tirée de l’album I’ll be your baby tonight, voici What’s the use of wond’rin’. Merci à Stéphane pour le tuyau.
Pourquoi diable Stephen Sondheim semble-t-il ignorer ou s’opposer à tout projet d’adaptation de ses oeuvres en France ? Stéphane Laporte – qui j’espère ne m’en voudra pas de reprendre ici ses propos, a une théorie intéressante. Selon l’adaptateur du Violon sur le Toit et du Roi Lion, également auteur de Panique à Bord (au XXè Théâtre à la rentrée), le problème vient de l’adaptation française dans les années 60 du premier musical de Stephen Sondheim (le premier où il a composé musique et paroles, s’entend) A funny thing happened on the way to the forum, l’un de ses plus gros succès sur Broadway. La version française aurait, dans sa grande clairvoyance, décidé de supprimer la musique du spectacle et ce dernier n’aurait tenu que 8 jours à l’affiche. Sondheim n’aurait visiblement pas digéré l’affront. Et il semble avoir la rancune tenace. Le Châtelet aurait ainsi récemment cherché à obtenir les droits de Follies. En vain.

C’était sans doute le meilleur spectacle présenté dans le cadre du Prix Découverte lors du Festival Les Musicals et il a d’ailleurs obtenu une "mention spéciale" du jury. Une partie de cache-cache se joue encore une semaine au tout petit théâtre de l’Article, près de République et de quelques stations Vélib’.
Le compte-rendu de spectacles n’étant pas un genre dans lequel je me distingue particulièrement, je vous renvoie au très bon article de Thomas Schmidt sur Regard en Coulisse [lire l’article]. Que dire de plus sinon que c’est remarquablement bien écrit (Nicolas Engel, livret et paroles, Raphaël Callendreau, musique), mis en scène (Nicolas Engel et Sarah Heitz-Ménard, scènographie) et interprété (Juliette Laurent). Le tout concourre à créer une ambiance tout à fait particulière, qui ferait presque passer Les Autres, avec Nicole Kidman pour Les demoiselles de Rochefort. Il faut voir Juliette notamment quand elle se brosse les cheveux dans le sens inverse du poil – ou du cheveu en l’occurence ou lorsqu’elle converse avec ses poupées imaginaires. Et mention également au texte, qui ne tombe jamais dans la facilité, ce qui est suffisamment rare pour être souligné.
Il ne reste que trois représentations d’ici le 29. Foncez-y.

Feriez-vous confiance à un hétérosexuel pour chroniquer, je ne sais pas, du… Bernadette Peters ou du Rufus Wainwright ? Oui, moi non plus. Dans ces conditions, on voudra bien ne m’accorder aucun crédit pour chroniquer Jusqu’aux dents. Le spectacle de Thierry Boulanger, Alyssa Landry et Emanuel Lenormand, se jouait (notamment) hier devant une partie non-négligeable de la musicalocratie gay parisienne. Le nom peut prêter à confusion, donc clarifions : Jusqu’aux dents n’est pas un pamphlet anti-armes, mais une comédie "obstétricale". Le pitch : un compte à rebours en-chanté avant l’accouchement pour trois amies. Les trois comédiennes interprètent des personnages un rien caricaturales. Il y a la catho, la baba-cool, et la directrice de mode, chacune est identifiée par une couleur, respectivement jaune, bleu et rouge. Des trois, c’est la deuxième, Amanda Fahey, qui a la plus belle voix, une magnifique voix grave de jazz woman. S’il y a quelques longueurs ici ou là, le tout est plutôt bien enlevé, avec, entre autres la chanson Coupable / Non coupable, et ses relents du Cell Block Tango de Chicago. Ceci étant dit, le spectateur gay de base aura du mal à ne pas sentir un peu étranger à tout ça, malgré quelques moments gay-friendly remarqués ("Martinien, enlève les talons aiguilles de Maman !", lors de la scène du choix des prénoms) ou un peu maladroits ("avouer son homosexualité", pleeeeease…). Le même spectateur pourra aussi se demander pourquoi CHAQUE spectacle à connotation hétérosexuelle met toujours un point d’honneur à caser le mot "levrette", le "L Word" hétéro (en alternance avec "vaseline") quelque part. La réponse fuse pourtant, sans appel. Parce que tout simplement ça fait toujours rire une partie de la salle. Je vous laisse deviner quelle partie. On appelle ça un "cultural gap". Essayez donc d’expliquer le concept de "fabuleuse" à un homme à femmes… La conclusion est que la comédie "obstétricale" LGBT reste à écrire. Mais le titre serait sans doute plus compliqué : "Jusqu’aux dents de ma femme-c’est-elle-qui-porte-le-gosse-moi-je-suis-le-parent-social" ou "Jusqu’aux dents de mon amie lesbienne-avec-qui-on-va-partager-la-garde" ou encore "(Coup de boule)-Jusqu’aux dents-de-sarkozy-qui-nous-laissera-pas-adopter-le-bâtard". Que du fun en perspective.
Cela n’aura pas échappé à celles et ceux qui l’ont vue, la série Ugly Betty, en plus d’être très gay-friendly (quoique le friendly est peut-être de trop), est très musical-friendly. Voici quelques broadway moments :
La vidéo de l’office du tourisme sud-africain Il vit en toi, single extrait du Roi Lion, qui arrivera le 4 octobre à Mogador.
"Marriages made in heaven don’t always translate to earth". Lire l‘intéressante critique de Ben Brantley dans le New York Times.

Alex Beaupain avait déjà enregistré quelques unes des "chansons d’amour" sur son album solo, Garçon d’honneur, paru en 2005. Après avoir vu et beaucoup aimé le film, la tentation était grande d’aller écouter les versions originales de ces petits joyaux. Ce n’est pas une grande surprise : les versions du film sont bien meilleures. Le talent d’interprète de Beaupain n’est pas forcément en cause, même si Garrel, Hesme, Leprince-Ringuet et Sagnier ont décidément fait du bon boulot. En revanche, les arrangements de Garçon d’honneur paraissent bien ternes à côté de ceux des Chansons d’amour. Pire, les chansons semblent molles. C’est comme si Au ciel, Se taire ou la Beauté du geste étaient en noir et blanc et que le film d’Honoré les avait passées en couleur. Les chansons qui ne figurent pas dans le film, dont la chanson titre, ne sont pas inoubliables. Un bon disque en soi, mais bien pâle à côté des Chansons d’amour. Pour les fans.
Voici un excellent court-métrage, parodie Cisjordanienne de West Side Story. Merci au Roncier pour le tuyau.
Quelques extraits piochés sur Youtube d’une soirée hommage à Oscar Hammerstein pour le centenaire de sa naissance. Il en manque beaucoup (voir liste complète des interprétations sur imdb). Ceci étant dit je vois que Patti Labelle a interprété You’ll never walk alone et j’imagine qu’elle l’a consciencieusement massacré comme elle fait pour tout ce qu’elle touche. Donc ça ne manquera pas. Si vous trouvez d’autres extraits merci de me les signaler, je n’ai pas fait une recherche très en profondeur non plus.
– Première partie
Julie Andrews : chanson non identifiée et coupée au début. Elle présente ensuite la vie d’Hammerstein. Audra McDonald et Peabo Bryson, chanson non identifiée et malheureusement coupée, sans doute l’"Operetta Medley"
– Deuxième partie
Anecdote émouvante de Sondheim, un sanglot dans la voix. Julie Andrews chante Edelweiss de The Sound of Music.
– Troisième partie
Keith Carradine : Oh what a beautiful morning d’Oklahoma. Bernadette Peters What’s the use of wonderin’ de Carousel.
– Quatrième partie
Intro de Julie Andrews. Medley par un ensemble, dont fait partie Audra McDonald..
– Cinquième partie
Michel Bell :Ol’ Man River de Showboat (musique Jerome Kern)
Voici une vidéo du 1994 Broadway revival cast de Carousel, que j’écoute actuellement. Carousel est sans doute la plus belle comédie musicale du duo Rodgers & Hammerstein. Dans cette vidéo extraite d’une cérémonie des Tony Awards, Shirley Verrett interprète l’immortel You’ll never walk alone. Ce n’est pas la meilleure version que je connaisse, mais elle n’est pas inintéressante. Dans le choeur, vous pourrez apercevoir deux futures stars, Audra McDonald, qui obtiendra ce soir son premier Tony pour son interprétation de Carrie Pipperidege (magnifique version de When I marry Mister Snow sur disque), et Taye Diggs, qui se fera bientôt connaître dans Rent.

Jusqu’ici la carrière discographique de Keren Ann était sur une pente ascendante. De la sympathique Biographie de Luka Philipsen au somptueux Nolita, les compositions de la chanteuse n’avaient cessé de s’améliorer. Las, on est obligés de reconnaître que ce cinquième album, sans titre – un manque d’idées révélateur ? – est légèrement décevant. On insiste sur le légèrement car il contient malgré tout quelques beaux titres comme le single Lay your head down, Harder ships of the world ou Liberty. On y retrouve un certain nombre de références : le Velvet pour Lay your head down (qui s’en affranchit ensuite) ou Mazzy Star sur le titre d’ouverture It’s all a lie. Et j’en oublie sans doute. Pour le reste, tout en étant très loin du ratage, on s’ennuie souvent. L’album, intégralement en anglais, semble trop américain, trop froid, trop éloigné, à l’image de la glaciale pochette signée Mondino. On n’y retrouve qu’assez rarement le génie mélodique de la Disparition ou de Nolita. A l’instar de celles du dernier Rufus, ces chansons manquent parfois de souffle. Bref, une petite déception.
C’est aujourd’hui que commence le premier Festival des Musicals à Paris. Passé la bande annonce un peu nunuche, deux choses sont à retenir :
1. Il est possible d’acheter un Pass pour obtenir des places à tarifs réduits pour 25 spectacles, dont Cabaret, Le Chanteur de Mexico (repris au Chatelet), ou Camille C..
2. Une dizaine de spectacles sont en compétition pour le Prix Découverte au XXè Théâtre [liste ici].
3. Vous pouvez suivre le programme sur la page MySpace du Festival.

J’ai mis le temps, direz-vous. Et vous aurez raison. Je n’ai pas voulu évoquer ce cinquième album de Rufus Wainwright à chaud parce que, voyez-vous, les premières impressions ont été plus que mitigées. Quelques semaines, de nombreuses écoutes et un concert au Trianon rendent l’écoute plus indulgente. Mais pas de là à considérer qu’il s’agit du chef d’oeuvre auquel on pouvait s’attendre après les deux foisonnants (et parfois bancals) Want.
Bien sûr, on est immédiatements séduit par Going to a town, poignante chanson de rupture à une Amérique décevante (rien de vraiment personnel, a tempéré le chanteur dans la presse). Et puis après, plus grand chose. Le premier titre est d’ailleurs – belle ironie – intitulé Do I disappoint you ?. Extraordinaire en live, le morceau est ici gâché par des orchestrations criardes pas très heureuses. Parmi les autres titres, on retiendra sans doute Rules and Regulations, le deuxième meilleur morceau de l’album et peut-être Between my legs. Tout le reste est bien foutu, bien écrit, mais sans âme, à l’image du morceau qui donne son titre à l’album. Où est le souffle qui traversait les précédents albums ? De camp Rufus serait-il devenu cynique ? Sur Nobody’s off the hook, ou Leaving for Paris on frise même l’ennui profond.
Une vraie déception.
Et une pochette affreuse, une de plus – exception faite de Poses.
Je vous invite à aller consulter l’édition de mai de Regard en Coulisse [cliquer ici], avec entre autres une interview de "notre Jérôme Pradon national", qui jouera Aragorn dans le Seigneur des anneaux à Londres, Stephanie J. Block, qui joue le rôle titre de Pirate Queen à Broadway et un article sur le festival des Musicals à Paris – que j’évoquerai un peu plus en détail dans une prochaine note.
Je signale par ailleurs que Regard en Coulisse vient également de se doter d’une page MySpace [cliquer ici].
