• Fred Vargas, Dans les bois éternels. Cette nouvelle enquête du commissaire Adamsberg est placée sous le signe des « ombres ». Celle d’une meurtrière qui profane les tombes dans une quête mystique, mais aussi celle pour le commissaire des erreurs passées, véritables ou perçues comme telles par un tiers. Vargas reprend les recettes habituelles: particularismes régionaux exacerbés (ici les normands et les béarnais), traits de caractères accentués (Adamsberg le rêveur aux intuitions géniales, son adjoint, Danglard, l’alcoolique cultivé et rigoureux, Retancourt le chêne que rien n’ébranle, etc.), éléments d’histoire habilement réutilisés (Vargas est historienne). Pour ce livre, on ajoutera le personnage de Veyrenc, le policier béarnais qui parle en alexandrins (« c’est de famille »). Pour un lecteur régulier, ces stéréotypes pourraient être lassants si la romancière n’avait un tel talent pour les exploiter. Cet avant-dernier épisode de la saga Adamsberg est rondement mené. On déplorera juste une conclusion qui semble un rien bâclée, et parfois abracadabrante (le chat qui retrouve grâce à son seul flair sa maîtresse à plusieurs kilomètres de son point de départ).
  • Michael Connelly, Deuil interdit. Le personnage fétiche de Connelly est l’inspecteur Harry Bosch, de Los Angeles. Après trois ans de retraite, le très morose Bosch, sorte de no-life version flic, fait son retour LAPD. C’est son ancienne co-équipère, Kiz Rider qui a œuvré pour que l’inspecteur revienne aux affaires. Mais le décor change légèrement: cette fois-ci le flic se retrouve aux Affaires non-résolues. Première affaire: le meurtre non-élucidé d’une jeune métisse 17 ans auparavant. Bosch et Rider reprennent l’enquête. Ils se replongent dans le climat raciste et les coups tordus de la police de l’époque. Un peu rouillé au début, l’inspecteur retrouve petit à petit son flair d’antan. Le rythme du livre est un peu plus lent que d’habitude, mais l’écriture de Connelly est toujours aussi fluide et précise. Dommage qu’elle soit parfois gâchée par de petites approximations de traduction. Quoiqu’il en soit, c’est un retour gagnant pour Harry Bosch.
  • Henning Mankell, Le Guerrier Solitaire. Troisième auteur, troisième personnage récurrent: ici le commissaire Kurt Wallander, en poste à Ystad, une petite ville suédoise. C’est le cinquième épisode des « aventures » de Wallander. Le commissaire, aussi joyeux que son confrère Harry Bosch (c’est à dire plutôt dépressif, si vous avez suivi) a une relation avec Baiba, une veuve de flic lettone, il commence à renouer avec son père qui n’a pas supporté qu’il prenne l’uniforme ; sa fille Linda n’a pas encore décidé d’être flic (voir notamment l’excellent Avant le gel) et Lisa Holgersson s’apprête à prendre la tête du commissariat. Le « Guerrier solitaire » en question est un meurtrier particulièrement violent qui tue ses victimes à coups de haches et leur inflige occasionnellement quelque supplice pre ou post mortem. C’est donc la course contre la montre pour Wallander et le commissariat d’Ystad, qui souhaitent éviter d’accumuler trop de cadavres. Et puis il y a cette adolescente terrifiée qui s’immole sous les yeux du commissaire, dans un champ de colza… Tout cela n’arrange pas le moral de Wallander, toujours aussi inquiet pour l’avenir de la Suède (Mankell en fait d’ailleurs un peu trop sur le sujet). Une bonne enquête pour un bon polar qui remplit parfaitement son rôle de lecture d’été.